Peut-être parce qu’ils sont quasiment homonymes et proches l’un de l’autre dans l’histoire de l’art, les mouvements Art déco et Art nouveau sont parfois confondus. Pourtant ils se distinguent assez radicalement l’un de l’autre : l’Art nouveau stylise l’anarchie propre aux éléments de la nature tandis que l’Art déco magnifie la sobriété de l’ère industrielle. Découvrez dans cet article quelques éléments de connaissance afin de vous aider à identifier correctement cet objet au charme intriguant qui vous a conquis en brocante.
L’Art nouveau précède l’Art déco dans la chronologie de l’histoire de l’art. Il est apparu à la fin du XIXème siècle, alors que la « belle époque » bat son plein. Les artistes les plus novateurs travaillent à créer une rupture avec le mouvement culturel du classicisme. Ce dernier, alors canon artistique dominant, puise son essence et son inspiration dans les œuvres de l’Antiquité. Au menu de l’époque : vraisemblance des formes, idéal de l’« honnête homme », équilibre et mensurations « à l’échelle ».
Alors que sur le plan économique l’Europe s’industrialise à grands pas, la contestation a déjà trouvé sa raison d’être dans les esprits les plus inspirés : le retour à la nature, en réaction contre l’industrialisation – un phénomène alors si neuf qu’il effraie encore – et à l’anthropocentrisme Gréco-Romain. C’est ainsi qu’à la suite de maîtres tels que Mucha, Grasset, Gallé, Tiffany ou encore Horta essaime une horde d’artistes qui ,dès lors, n’auront de cesse d’introduire des formes courbes et organiques, des volutes et des arabesques dans l’espace urbain. Les motifs végétaux tels que l’iris, le nénuphar, l’orchidée sont particulièrement prisés et se retrouvent entrelacés en d’harmonieuses volutes sur tous les supports, de même que le corps féminin y est célébré dans toute la gloire de sa sensualité. Certains brocanteurs proposent d’ailleurs parfois à la vente des sculptures de femme en bronze ou des vases en pâte de verre soufflée, reconnaissables à leurs reflets nacrés et à leur gravure en camée. La célébration de la nature dans son anarchie apparente ne doit pas éclipser pour autant la prouesse technique de ces artistes qui parviennent à donner aux métaux les courbures les plus sophistiquées et à souffler le verre comme jamais personne ne l’avait fait auparavant. L’Art nouveau est un art total, c’est-à-dire qu’il s’incarne sur absolument tous les supports disponibles : la joaillerie, la peinture, l’architecture, la mode vestimentaire sont autant de prétextes pour introduire l’asymétrie de la Nature dans les villes, qui par ailleurs se modernisent à grand pas dans une frénésie de fumée et de métal.
Les années 1920, qualifiées d’ « années folles », distillent un parfum sulfureux de fêtes et d’insouciance. Elles marquent également, sur le plan artistique, un élan moderniste sans pareil. Finies les volutes alambiquées, les courbes féminines exaltées et l’asymétrie inspirée par le végétal. L’époque s’enfièvre pour les lignes droites, elle célèbre la vitesse et le progrès par des motifs en arcs-de-cercle, en engrenages ou en rayons. En rupture totale avec l’Art nouveau, l’Art déco est donc un mouvement très géométrique, voire « géométrisant », en résonnance directe avec les avancées technologiques de l’époque, en matière d’automobile et d’aviation. Saviez-vous par ailleurs que le fauteuil club – d’origine française- est une pièce incontournable de l’ameublement Art déco que l’on trouve fréquemment en brocante ? De même d’ailleurs que les lampes champignons en métal ou les miroirs à parecloses en verre ou bien encore les meubles en noyer sombre ou en acajou (des teintes de bois très prisées dans l’ameublement Art déco). A plus grande échelle, dans l’architecture par exemple, l’Art déco allie la symétrie à la sobriété pour donner naissance à des monuments tels que le Chrysler Building à New York ou encore le Théâtre des Champs-Elysées à Paris. Des artistes comme Loewy, Lempicka, Rulhmann, Teague en font leur spécificité. Néanmoins l’Art déco ne rejette pas l’inspiration de la nature et de la sensualité, il se contente de l’adapter à ses canons. Ainsi la femme célébrée par l’Art déco est coiffée à la garçonne, longiligne et sportive : en un mot, moderne.
Il est tout à fait possible de trouver des objets et des meubles Art nouveau et Art déco en brocantes. Le mobilier y est particulièrement présent, de même que les vases en pâte de verre (façon Gallé ou Majorelle, typiques de l’Art nouveau), les luminaires (lustres boules) ou encore la joaillerie. Pour repérer un meuble Art déco, soyez attentifs aux cannelures ou aux poignées chromées. Les matières utilisées sont généralement l’acajou, le sycomore ou le palissandre. En ce qui concerne l’Art nouveau, soyez vigilant aux riches moulures apparentes, aux inspirations « botaniques » et aux lignes floues. La valeur d’un meuble Art nouveau résulte de la cohérence des détails avec l’ensemble du meuble. Ainsi, les accessoires de bronze doivent reproduire les mêmes motifs que les sculptures des montants, par exemple.