Les brocantes et vide-greniers tels que nous les connaissons aujourd’hui se sont développés en France durant le siècle précédent. Mais on pratique le négoce de vieilleries et de curiosités depuis l’Antiquité. Après tout, rien n’est plus humain que l’attachement au passé !
Les textes anciens font référence à des sortes de marchés aux puces qui se tenaient sur l’Agora d’Athènes. Des vieilles fripes, des poteries, de la céramique et d’autres curiosités usagées étaient vendues sur des étals à la sauvette. Les Egyptiens auraient également été des collectionneurs et des apprentis brocanteurs dixit Hérodote. Pour leur part, les Romains inventent la salle des enchères sous le regard désabusé des grands philosophes tel Cicéron et Sénèque. La lampe de terre du célèbre Epictète est même vendue 3 000 drachmes par de lointains ancêtres des antiquaires actuels !
Au Moyen Age, on n’hésite pas à vendre ses biens les plus précieux et jusqu’à ses chausses trouées pour s’en aller faire les croisades ou partir en pèlerinage. Camelots, ferrailleurs, colporteurs et marchands ambulants font un business lucratif de la récupération. Le marché de l’occasion se développe et le malheur des uns fait la bonne fortune des autres. Des foires apparaissent, les quais se couvrent d’étals et des corporations se forment.
Face au développement de ce marché parallèle, Louis XIV décide de contrôler davantage les pratiques du commerce. Par ordonnance royale, les marchands d’occasion doivent consigner l’origine de la marchandise ainsi que son prix de vente. A partir du XVIIIe siècle, les collectionneurs se font plus nombreux et on recherche désormais des objets rares et précieux. Les brocanteurs experts concurrencent les « crieuses de vieux chapeaux ». Ils se spécialisent dans le domaine de l’art ou des antiquités. Pour enrayer le commerce d’objets volés, on rechigne à acheter aux domestiques et on enregistre l’état civil des vendeurs pour ne pas être poursuivi en justice.
Les biens saisis à la noblesse et à l’Eglise deviennent des biens nationaux. On les revend publiquement pour renflouer les caisses de l’Etat. Les ventes aux enchères se démocratisent et il n’est plus nécessaire d’être aristocrate pour se croire collectionneur. Pendant l’Empire, la mode est aux antiquités grecques, romaines et égyptiennes.
Au début du XXe siècle, les premières Puces parisiennes se tenaient en périphérie, porte de Clignancourt, sur un simple terrain vague. On y vendait sous le manteau des rebuts et de la vieille literie infestée de parasites. Après la Grande Guerre, le marché se diversifie si bien qu’on sédentarise les Puces et qu’on fixe la vente au samedi et dimanche exclusivement.
Il faut attendre les années 70 pour que la vente d’objets particuliers se démocratise. Les familles naguère attachées à leur patrimoine se débarrassent en masse des assiettes de grand-mère et des vieux meubles. Le marché de l’occasion n’est plus réservé aux populations pauvres et exclues. A contre-courant de la société de consommation, les Français privilégient la récupération et le recyclage pour lutter contre le gaspillage. La braderie de Lille, où les domestiques vendaient autrefois les vieilles nippes de leurs riches employeurs, est aujourd’hui l’un des plus grands événements de France !