Difficile de négocier avec des brocanteurs quand on ne parle pas leur langue ! Certaines expressions vieillottes ont tout de messages codés de la guerre froide.  Voici quelques clés de vocabulaire pour décrypter les offres, engager des joutes verbales absurdes et faire de bonnes affaires.

Chiner

Voilà un mot que tout le monde emploie, mais que personne ne comprend ! Ce terme est en fait une contraction du verbe « s’échiner ». Les premiers colporteurs transportaient en effet leur marchandise sur leur dos, qu’on appelait gracieusement échine dans le bon vieux temps. Aujourd’hui, chiner signifie chercher de vieux objets dans les brocantes.

Acheter au cul du camion

Non, votre interlocuteur n’est pas vulgaire et il ne cherche pas à vous insulter ! « Au cul du camion » renvoie à l’heure de bon matin où les brocanteurs déballent leur marchandise. Les chineurs professionnels les attendent souvent de pied ferme, collé à l’arrière train des camions, prêt à remporter les meilleures affaires. Attention à la concurrence !

Un mouton à cinq pattes

Si grâce au progrès scientifique, il n’est pas impossible que des moutons à cinq pattes voient bientôt le jour, un tel animal reste encore exceptionnel de nos jours. L’expression est ainsi utilisée pour désigner un objet d’une valeur rare, comme on n’en voit pas souvent. Ouvrez donc grand vos oreilles !

De la came chaude

Evitez la came chaude, elle pourrait vous brûler les doigts ! Pour cause, il s’agit de marchandise volée. De manière générale, méfiez-vous des objets flambant neufs vendus à prix réduit sur les étals. Préférez la came froide et franche, c’est-à-dire vendue directement par les propriétaires sans intermédiaires professionnels.

Mettre en nourrice

Imaginez que l’objet est un bébé. Son papa le brocanteur le confie à une nourrice, c’est-à-dire un autre brocanteur qui a plus de chance de le vendre. Pas très moral tout ça, mais très lucratif !

Se faire emplâtrer

Vous avez acheté 50 euros un vieux buffet avant de découvrir qu’il  était à moitié défoncé ? Vous vous êtes fait emplâtrer. On ne vous y reprendra pas deux fois.

Dans son jus

Une marchandise « dans son jus » n’a pas été retouchée ni nettoyée. Le brocanteur la vend telle quelle, à vous de l’égoutter !

Drouille

Cette chaise, c’est trop de la drouille ! Les pieds sont branlants, l’assise défoncée et le dossier cassé. Bref, de la camelote. Passez votre chemin.

Rossignols

Ne vous y trompez pas, les rossignols sont des articles passés de mode, défectueux et invendables. De même que l’oiseau est haut perché dans les arbres, ces rebus sont rangés dans les plus hautes étagères ou en arrière-plan.

Le prix téléphoné

Un prix téléphoné est un prix correct, pas besoin de passer un coup de fil à votre ami antiquaire. A l’inverse, une marchandise truffée est vendue à un prix indécent.

Velours

Les brocanteurs appellent « velours » les bénéfices qu’ils réalisent. Essayez de vous faire du velours cette année !

Pour voir si vous avez bien suivi, voici un petit test : « Je suis allée chiner dimanche dernier, mais je ne me suis pas réveillée assez tôt pour acheter au cul du camion. D’habitude, il ne reste que des rossignols ou de la drouille l’après-midi. Mais devine quoi : je suis tombée sur un mouton à cinq pattes, un buffet Louis XVI à seulement 50 euros ! Pour le coup, je me suis demandée : ce ne serait pas de la came chaude par hasard ? Le vendeur essaie de m’emplâtrer avec une histoire louche, comme quoi le buffet a été mis en nourrice chez lui, qu’il ne sait pas d’où il vient. Le prix est carrément téléphoné, alors j’ai acheté. Le mec était tellement content de se faire du velours qu’il m’a aidé à transporter le buffet jusqu’à ma voiture. Mais comme je l’ai acheté dans son jus, il va falloir le retaper un peu ce buffet. Tu voudrais bien m’aider ? »